Une avancée de la Société d’héritiers
Les inégalités patrimoniales progressent en France. Le phénomène, qui s’inscrit dans le mouvement de mondialisation, n’est pas spécifique à la France mais il est plus marqué que dans les pays voisins. C’est une société d’héritiers, de plus en plus âgés, qui se développe année après année. L’histoire montre qu’à terme de telles sociétés sont fragiles et que l’enrichissement excessif engendre le populisme et les explosions sociales. La prudence, comme le souci d’équité, conduit à utiliser le levier fiscal pour corriger l’accaparement des richesses et les inégalités excessives, faute de pouvoir agir directement sur les causes.
Cette préoccupation semble absente des préoccupations du Président de la République. C’est la libération des individus qui inspire son action. Il faut que chacun dans une société mobile soit pleinement autonome et puisse exploiter toutes les opportunités. Il combat une société pétrifiée plus qu’une société inégalitaire. Le collectif n’entre pas dans son champ de vision. Seuls compteraient les individus.
Les choix fiscaux de la loi de finances 2018, concernant notamment l’imposition sur le capital, reflètent cette préférence.
Les imperfections de l’ISF justifient sa réforme : assiette (œuvres d’art) plafonnement qui aboutit à une exonération quasi-totale des plus grandes fortunes et coût économique ; son effet dissuasif, en particulier pour les décideurs étrangers et lors de la « cession de l’outil de travail » est indéniable, même s’il est difficilement mesurable. Sa suppression pour le patrimoine mobilier fait disparaitre ses inconvénients mais son maintien pour le patrimoine foncier et immobilier sera mal supporté par des propriétaires, qui pour une part appartiennent à la classe moyenne. Mieux vaudrait revaloriser l’imposition des revenus fonciers mais cela suppose une mise à jour des assiettes, opération longue et complexe.
L’ISF n’étant qu’une composante de la fiscalité sur le capital, une approche globale permettrait d’aboutir à une fiscalité équilibrée, en harmonie avec d’autres pays européens. L’augmentation des droits de succession serait la compensation, fiscalement et socialement logique, à la baisse de l’ISF. Cette hausse ne serait qu’un aspect d’une réforme d’ensemble de la fiscalité des transmissions. L’objectif principal de cette réforme serait de modifier le mode de calcul, le taux d’imposition étant assis sur l’ensemble du patrimoine reçu par un individu, ce qui limiterait l’avancée de la société d’héritiers (cf : note de France Stratégie de Janvier 2017)
Le budget 2018 sera perçu comme un budget pour les riches. L’addition ISF + prélèvement forfaitaire de 30% des revenus mobiliers ne sera pas probablement pas compensé pour l’opinion par l’addition baisse des cotisations sociales + augmentation de la CSG.
Pierre-Yves Cossé
Septembre 2017
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