Redéfinir la social-démocratie
Au cours du 20ème siècle, la social-démocratie s’est largement confondue avec l’Etat-providence. On accepte les règles de l’économie de marché à condition que les travailleurs soient suffisamment soutenus et protégés. Après la seconde guerre mondiale, les partis sociaux-démocrates ont voulu garantir à la fois la paix et le développement économique et social des pays qui avaient été ravagés par la guerre. Ils ont été les artisans acharnés de la construction européenne avec la droite dite démocratique. L’Europe est devenue un vaste marché commun, mais elle peine à se doter de politiques et des institutions qui permettraient de le réguler et d’assurer une protection sociale suffisante. Elle s’est ainsi confondue avec l’image des « élites » qui voudraient imposer aux peuples un « diktat libéral » et un mode de vie à l’américaine.
Les populismes de droite et de gauche se nourrissent des ambigüités et des insuffisances de l’Union européenne. La social-démocratie en est évidemment la première victime. Il n’y a pas d’avenir pour la social-démocratie si l’Union européenne ne récupère pas des pouvoirs d’Etat.
Mais que valent les principes de l’Etat-providence au 21ème siècle ?
Une économie mondialisée dominée par de puissants groupes multinationaux, une planète en proie à des dérèglements continus dans tous les domaines du vivant, des inégalités croissantes entre pays déjà développés et pays dits en voie de développement, entre pays riches et pays pauvres, entre riches et pauvres dans un même pays, des crises financières chroniques avec leurs conséquences économiques. Et puis de migrations de masse en raison de déséquilibres économiques et démographiques et des soubresauts que connaît le monde islamique avec leurs conséquences dans les pays occidentaux. Ce sont quelques unes des spécificités de notre temps auxquelles s’ajoutent des problématiques propres à chaque pays selon son histoire et sa position géographique. L’inadaptation des Etats à ces évolutions engendre une crise profonde de la démocratie et par conséquent de la social-démocratie. Il n’y a pas d’avenir pour celle-ci sans une révision en profondeur des conditions de la vie démocratique dans le monde d’aujourd’hui.
La question démocratique ne se limite pas à la protection et à la promotion de l’individu, quels que soient son genre ou ses origines. Elle concerne les conditions de l’exercice du pouvoir dans une société ouverte au monde. La république était la revendication de nations qui veulent devenir des Etats où le peuple soit souverain. Il faut inventer une démocratie qui réponde au dépassement des pouvoirs de l’Etat-nation. Il y faut un esprit de coopération et un effort de régulation à l’échelle internationale. Les accords de Paris en décembre 2016 sur la lutte contre le changement climatique sont à cet égard sinon un modèle, du moins un symbole. Il n’y a pas d’avenir pour la social-démocratie si elle ne s’inscrit pas dans une dynamique de renouvellement de la vie démocratique.
Réaffirmer les valeurs socialistes à travers les réponses apportées à la question sociale à l’échelle européenne et à la question démocratique dans le monde d-aujourd’hui, c’est le chemin que devraient prendre des militants soucieux de redonner du sens à un engagement de gauche. C’est un chemin social-démocrate…
Robert Chapuis
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